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LES ANACHRONIQUES
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1 août 2007

20.2. Le tribut de la tribu d’Abram.

Nonante-neuvième jour.


Un bien curieux livre, le livre du moine.

Abram est bien celui qui a commencé à édicter, à proclamer, à se déclarer Khalife à la place de personne car personne ne l’était. Il tenait la plume, le stylet, le burin, le pinceau, le fusain, il tenait le pouvoir. Il vit autour de lui les tribus errantes dans le désert avec moutons agneaux et compagnie, dont aucun chef n’avait eu l’idée d’être le chef des autres tribus en même temps que de la sienne ; Abram a inventé le grand chef Sioux.

  Abram est le premier à s’y être collé. D’autres suivront, atelier d’écriture, cadavre exquis, aventure oulipienne et millénaire, j’écris un chant et tu continues à ta manière mais sans retoucher. Gare à l’incohérence. Voilà la règle qu’il a inventée. Savait-il qu’elle durerait des siècles et des siècles ?

  Je le dis ainsi. De grands spécialistes me montreront qu’il n’en est rien preuves à l’appui, et ils auront raison sans doute. Ils sauront me dire en quelle écriture et avec quelle langue le livre a été commencé, ils m’expliqueront que les écriveurs d’après ne comprenaient pas la langue du début et qu’il faudra bien un jour qu’un David ou un Salomon remette le tout en forme pour avoir l’air majuscule. Ou une autre explication qui vaudra bien celle-ci. Allez donc voir les archéologues compétents.

  Moi je sais que dans ces régions de Méditerranée Orientale, quelque part une écriture alphabétique a été inventée tandis qu’explosait Santorin, encore un raz-de-marée chez les phéniciens. Y a-t-il un lien entre l’explosion et l’écriture alphabétique ? La mémoire d’occident serait-elle née de la tectonique et du volcanisme ? Je ne suis pas sûr d’apercevoir Santorin du bord de ma chapelle, il y a trop d’arbres, mais bien avant qu’elle fasse l’icône un homme passant par ici a dû sentir le tremblement de terre et voir la poussière qui fit la nuit pendant quarante jours.

  En ce temps là, les descendants d’Abram prospéraient chez Pharaon au milieu des petits dessins incompréhensibles, forcément puisque Champollion ne les avait pas encore déchiffrés. Eux, ils défrichaient.

  Alors je repose la question. Avec quelle écriture Abram avait-il pu commencer d’écrire son livre ?

  La question est d’importance. C’est la question d’où tout doit procéder, nos vies en dépendent, tout part de ce monsieur là. Il s’en alla dans la montagne en disant aux bergers de sa tribu éberlués qu’il allait tuer son fils en holocauste, il le fallait, tout allait mal, l’herbe se faisait rare dans le désert, on parlait de réchauffement de la planète, les pustules fleurissaient sur la peau des gens et des bêtes, les voisins venaient en force et volaient les femmes et les fromages, et toutes ces choses qu’envoie le Dieu primesautier quand il s’ennuie.

  Il a planté là serviteurs et artisans, leurs femmes et leurs enfants, il a pris son grand coutelas à la lame étincelante dans le soleil levant, il a saisi son fils Isaac riant dans sa poussette, et il est passé derrière la colline où personne ne pouvait le voir. On entendit des cris et des gémissements, et longtemps après, trois fois la nuit était revenue, on les vit sortir du sentier causant en paix et portant les restes du méchoui, car un agneau était passé trop près. L’enfant avait grandi.

  A partir de ce jour, il n’y eut plus d’ennemis et l’herbe a repoussé. Abram a raconté tout tremblant encore qu’à l’instant même où il levait le couteau pour égorger dans les règles de l’art l’enfant qui pleurait, son couteau lui a échappé des mains et il a su qu’il ne pouvait pas. Dieu existait donc. A moins que le sang paternel ne se soit mis de la partie, peu de pères me contrediront.

  Et Abram a vu que cela était bon. Il ne s’en était pas si mal sorti, de son affaire. Il s’est trouvé définitivement à la tête de la tribu et des tribus sœurs alors que peu de temps auparavant il avait fort à faire avec ce concurrent de Loth qui lorgnait un peu trop vers Sodome. Désormais il s’appellera Abraham parce que c’est plus long et plus sérieux qu’Abram raccourci.

  Pour savoir ce qui s’est passé derrière les rochers, à l’abri des regards des serviteurs, il faudra le croire sur parole. Ainsi devient-on chef.

#20.3 à suivre.

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Commentaires
M
Uxor remansit in Sodomis, jam non caro corruptibilis, sed statua salis semper manens, et per naturalia ea quae sunt consuetuedinis hominis ostendens.
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M
Ce que j'aime bien avec les histoires, c'est qu'on n'est pas obligé(e) de les croire ....
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Mon nom est THEOLONE - Philosophie et bavardage
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