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LES ANACHRONIQUES
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23 août 2007

20.4. La mouche du coche.

Cent-unième jour.

Savez-vous comment on dit Mouche en farsi ? J’aurais pu imaginer une autre langue exotique, mais depuis Montesquieu c’est en Perse que l’on trouve l’observateur extérieur. Natif de Bordeaux, je ne peux faire moins que le chercher aussi en Perse. D’autres raisons peuvent être invoquées, qui sont inutiles.

 

En Farsi, Mouche se prononce Magass. Enfin je le crois, il faut bien finir par croire à quelque chose. Je me demande si un linguiste s’est penché sur l’étrange phonétique qui mène de Magass la mouche à m’agace cette mouche, cette mouche de la question qui bourdonne dans mon crâne à propos de parole sans preuve ni constat, à propos de la parole à croire sur parole pour ses seuls beaux yeux. La question du coche qui va avec Magass et qui finit par m’agacer. Ne me demandez pas comme on l’écrit pour de vrai sur du papier avec de l’encre, ou en calligraphie savante, mais mes oreilles en ont bien entendu la prononciation, assez entendu le soir où le cheval que je chevauchais s’est délesté de son chargement sous prétexte de ruades à mouches, pour s’en souvenir autant que mon coccyx.

Magass, Magass, disait le palefrenier persan en rigolant de mon costume empoussiéré, et plus encore de ma mine de croisé défait.

Ainsi mon discours bibliophile n’a qu’un seul objet qui me travaille depuis toujours, depuis que les uns et les autres sous prétexte d’éducation stricte et traditionnelle, m’ont fait suivre l’inévitable cursus catéchumène, de serment solennel en promesses arrachées, de genoux ployés en cantiques déployés. Ainsi moine suis-je devenu, sans que le bourdonnement de la question n’ait cessé de rôder et d’éroder, comme une abeille.

Le miel s’est tari et la question devint mouche. Depuis je relis le Grand Livre et je tente d’en extraire le jus, le lait caillé et le miel perdu, le sucre doré et le caramel mou. Je suis le Moine Théolone, le mécréant de ces dames, le silencieux de la fausse note. Mes saintes Barbara, priez pour moi, sainte mère et sainte fille, je ne suis pas sorti de mon auberge et je travaille mes chapeaux.

On dit que le Grand Livre a été écrit par Dieu, mais qui le dit, qui est ‘on ? Des hommes qui disent avoir vu Dieu écrire. Moi je l’ai vu au cinéma et le grand manitou s'y nommait Cecil Bé Deux Mille. Avec un chauve dans le rôle de Môzeuze. C’était du cinoche, ce n’était pas une preuve de l’existence de Dieu, à la rigueur une preuve de l’existence du cinémascope. Je me méfie des preuves hollywoodiennes.

Ma mémoire me joue des tours, le chauve n’était pas Môzeuze, le chauve était Pharaon. Le prophète était chevelu avec tablettes de chocolat, il ne faut pas être chauve pour la nuit monter sur le mont.

Il va bien falloir les croire sur parole, ces hommes d'autrefois, parce que moi comme tout le monde, je n’ai rien vu. Ils peuvent se pavaner en disant qu’ils croient et qu’il faut les croire, eux ils ont vu c’est ce qu’ils disent. Heureux qui n’a point vu et qui a cru ; mais alors, où sont leur mérite et leur gloire, à eux ? Personne ne pourra jamais prétendre qu’il a une preuve par laquelle il croit, et quand il l’aurait je resterais obligé de le croire sur parole parce que moi, je ne dispose pas de cette preuve.

C’est finalement très simple et là réside le cœur absolu de la foi. Je n’ai pas besoin de preuve pour croire, croire sans preuve sans même songer à en chercher une. Pareillement, et que personne ne juge ni ne condamne sinon où serait la véritable foi, je n’ai pas besoin de preuve pour ne pas croire, pour la seule raison qu’on ne peut jamais prouver que ce qui n’existe pas n’existe pas, qu’on ne peut jamais prouver que ce qui n’est pas sensible n’existe pas. J'entends 'sensible' au sens d’accessible aux sens, y compris par le truchement des appareils les plus savants.

Le Grand Livre que je décortique n’est pas l’instrument de la foi, il en est seulement un objet. L’origine de la foi ne doit pas être recherchée au sommet du mont Ararat ou du mont Sinaï, dans la plaine du Jourdain ou sur le chemin de Damas ; l’origine de ta foi est à chercher au fond de ton antre, de ta cave, de ton tombeau, au fond de toi si tu crois. Si tu ne crois pas tu es libre.

Chacun mettra son fond où il voudra, là où il verra que cela est bon.

à suivre, bientôt la fin.


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