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LES ANACHRONIQUES
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7 mars 2007

‎19.3.‎ Pluriel.‎

Nonante et unième jour.

 

Comme les singes, mais aussi comme les buffles, les fourmis, les sardines et quelques autres espèces que tu trouveras tout seul, ils vivent ensemble. Tellement ensemble que les mots ne leur manquent pas pour se désigner : tribu, groupe, troupeau, peuple, ethnie, nation, bande, mafia, famille, société, entreprise, syndicat, religion, race, culture, communauté, j’en passe et j’en oublie. C’est dire l’importance de n’être pas seul pour que l’individu zom existe.

3. Pluriel.

Fais l’expérience. Tu prends un zom tout nu et tout seul, garnement ou garnemente ou non, et tu le poses dans la jungle des villes, dans la jungle des campagnes, dans la jungle de la jungle, dans la toundra, il ne survivra pas plus de quelques minutes, quelques heures, quelques jours, selon le cas et le degré de résistance. Dans la ville il se fera écharper pour attentat à la pudeur. Dans la campagne il se fera tirer comme un lapin par le paysan suspicieux dont il foule le champ labouré de frais. Dans la jungle il se fera embrasser par le serpent python bicolore de rocher. Dans la toundra il se fera dévorer tout cru par le tigre blanc de Sibérie.

Tout seul, il est cuit, le zom.

Alors ils se terrent et se serrent les uns contre les autres, tremblants effrayés, à se demander quand donc ce paresseux de Prométhée leur donnera le feu. Tu le sais déjà, dès qu’ils l’auront ils le garderont pour eux, histoire de cramer leurs voisins et de conquérir le monde.

Faut-il pour autant le leur refuser ? Bien sûr que non, j’ai écrit une fable à ce sujet que tu as lue ailleurs avant. Parce que Prométhée n’y est pour rien dans cette histoire de feu, le zom a su s’en emparer sans lui mais avec ses congénères, et parce que mon steak saignant sans feu je devrais y renoncer.

L’hiver duré plus longtemps que d’habitude. Le moine a poursuivi sa quête, il a lu les grimoires et les parchemins, il a déchiffré les papyrus et les tablettes, et avec sa loupe à fourmis il a regardé de près.

Figure-toi qu’il y a une différence colossale avec les fourmis. Je me souviens bien du temps où j’étais fourmi. Je n’avais même pas de numéro pour me distinguer des autres, nous étions tous exactement et résolument interchangeables et si ma mission était de rapporter la grosse miette là-bas la fourmi ma voisine l’aurait pu accomplir exactement comme je le faisais si elle n’avait fait à ce moment là exactement ce que j’aurais pu tout aussi bien faire comme elle. Flexibilité, qu’ils disaient.

Il paraît qu’avec un gros microscope, des coupeurs de fourmis en quatre savent faire la différence entre cette fourmi ici et cette fourmi là-bas. J’étais tellement comme les autres que je n’étais pas moi mais eux, et qu’elles étaient nous. Je ne me suis jamais coupé en quatre. Vas savoir, il y a peut-être de l’individualisme et de l’anarchisme chez les fourmis aussi. Révolution dans la termitière, guerre civile dans les poutres apparentes, massacre dans ma pelouse. Sans microscope, je reste avec des fourmis que ne sont que des uns du tout.

Il en est tout autrement chez les zoms. Chacun d’eux se prétend, comment disent-ils déjà, j’ai du mal à retenir ce mot dans mon cerveau de fourmi, à le concrétiser, individu. Chacun se sent unique. Individu unique, pléonasme de zom. Il est temps que j’arrache ma tunique de fourmi si je veux comprendre.

J’ai bien remarqué que parfois, chez les buffles, on en voit qui s’écartent un peu, sur le côté ou à la traîne. Je ne parle pas de celui qui marche en avant, le chef, mais des indisciplinés, des imprudents, des rêveurs, des boiteux. A la traîne sont les vieux, les fatigués, les blessés, et le troupeau n’en a que faire, il les laisse s’éloigner ou plutôt il s’éloigne peu à peu, ils finiront dévorés par les lions. Ceux qui gambadent à côté rentrent vite au premier effluve félin sinon ils rejoindront les vieux dans l’estomac du lion. C’est ainsi que les lions vivent et laissent les troupeaux tranquilles.

Même en restant groupir, les zoms se veulent individus et le sont. Et je me demande comment on peut résoudre cette contradiction, si vraiment il faut résoudre.

#19.4 à suivre.


Commentaires
A
Il y a du frémissement dans l'air.
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M
Toujours peccantes ? J'ai dû être fourmi aussi, en des temps reculés et décore t-on les fourmis ?
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M
Des fourmis, des fourmis et pas de cigale à l'horizon
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M
Se couper en quatre, c'est pour faciliter la digestion du lion ?
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A
Bon, je baguenaude, d'accord. Et pendant les quarante jours qui viennent, je baguenauderai.<br /> <br /> Encore eût-il fallu que je baguenaudasse, et que nous baguenaudassions de concert, de théâtre, de bouteille à la mer en catxcat rouge, et de ricochet en humeur peccante.<br /> <br /> En voici un verbe qui me sied aujourd'hui et pour les quinzaines qui viennent. Je vous le dit tout net, à toi Marie fidèle, à toi Luciole passagère, et aux carillons qui passent, aux robots qui spamment, et à tous ces visiteurs uniques qui laissent un peu de vie chez moi et parfois une trace de pas, le temps est à l'orage et les averses me calfeutrent dans mes terriers, dans mes buissons, dans mes sous-bois.<br /> <br /> Un océan n'y retrouverait pas ses poissons d'avril. Lisez et commentez de plus belle, la modération ne s'activera pas mais je vous verrai et m'en réjouirai.<br /> <br /> J'ai besoin de vous. Probablement plus que vous de moi, je prends tout et ne rends rien. Ainsi je m'enrichis sur votre dos.<br /> <br /> Alors, à vous tous, salutations distinguées, embrassades chaleureuses et amicales, petits bisous parfois.<br /> <br /> A la revoyure, à Pâques ou à la Trinité. Il y aura peut-être quelques billets encore ces jours-ci, mais feu de paille et temps qui vole à la tire.
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