371 - Intermezzo : Le combat de rue

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‘Aliénor est partie. Elle a renoncé au confort étouffant. Elle préfère livrer bataille, logement chers et exigus, salaire modéré c’est ainsi que parlaient déjà les gestionnaires qui nous gouvernent et cela voulait dire tout juste de quoi vivre. Un seul horizon au bout de la route, une seule ambition, offrir à sa fille un lieu digne d’elles deux, où enfin vivre ensemble.

Mais voilà, que devient l’enfant ? ‘Aliénor avait trouvé un poste administratif qui lui évitait la dure réalité de la classe, son équilibre était encore trop fragile, le temps de sortir de la torpeur artificielle qu’on avait trouvé bon de lui asséner. Il avait paru simple à tout le monde que l’enfant resterait dans la verte nature, veillée par les grands-parents. Comment leur en vouloir, solution de bon sens solidaire, piège imparable.

Tu connais la vie parisienne. Les chambres de bonnes hors de prix ne sont pas la spécialité d’aujourd’hui, et ceux qui prétendent que c’était mieux avant ont la mémoire courte ou, plutôt, la mémoire sélective. Huit années durant elle s’est battue pour trouver de quoi recevoir enfin sa fille, lui offrir le bon logement et le quotidien tranquille, gladiateure inlassable qui chaque dimanche passait douze heures dans les trains pour vivre un moment avec elle à la campagne, arrêter le temps un instant, échanger larmes et sourires, réchauffer leurs deux cœurs et leurs deux corps l’une à l’autre, sous le regard glacé des autres qui tenaient déjà en main leur jugement à perpétuité. Sans le savoir, ou plutôt en devinant confusément ces vols de corbeaux, elle rentrait dans son chez-elle parisien à minuit passé, au milieu des noctambules et des longs couloirs tristes du métro.

Il est toujours facile de refaire l’histoire du haut de son ignorance, en ne regardant que ses certitudes. Mais il n’y aura que les malfaisants et les imbéciles qui prétendront que ‘Aliénor a abandonné sa fille. Ils l’ont commis, ce crime, ils le commettent encore ; comment peut-on oser un tel mensonge ? Et pourtant, je sais qu’on a osé, qu’on ose encore, y compris ceux qui n’étaient pas nés, et tous ceux qui parlent de ce qu’ils ignorent.

2006 à 2023 - FIN de la CINQUIEME PERIODE

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