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LES ANACHRONIQUES
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16 janvier 2008

Dents de scie

Voilà coi de nouveau le moine. Je le sentais bien venir, le silence théologal. Il a bouclé sa période, et sous prétexte de souffler il s'est assis sur sa chaise devant son café, il touille l'esprit vague, le regard pourpre et la brume au front. Je sens bien qu'il rumine, un lot de foin trop vite avalé, une couleuvre qui ne veut pas descendre, ces sifflements d'oreille qui n'en finissent pas, ces mouches dans les yeux.

Il voudrait revenir sur ce qu'il a écrit, recommencer une vie ou la changer, il voudrait dire autrement, savamment, il voudrait il voudrait il voudrait, mais il a déjà peine à tenir la petite cuillère d'argent venue de son aïeule qui seule a le droit de touiller l'esprit vague et le noir breuvage. Alors une plume, tu n'y penses pas. Depuis quelques mois, une pancarte pend à la porte de la chapelle où l'on a écrit fermé pour cause de travaux. Il n'y a ni échafaudage, ni pompe, ni compresseur, ni groupe électrogène, ni sacs de mortier prêt à mélanger, enfin toutes ces choses qui encombrent les beaux lieux sous prétexte de travaux, seule la pancarte isoloir pend et se balance doucement en frottis-frotta contre le bois du ventail.

Au dos reste écrit pour la visite s'adresser au café du village. Mais c'est au dos et on ne lit pas. Les autocars ont renoncé au lieu et l'icône, à l'intérieur, est vraiment fâchée.

Le moine a fait des promesses d'ivrogne. Il a dit qu'il allait traiter du progrès et du handicap, qu'il allait pérorer sur son désir d'une société de médiocres, qu'il répliquerait vertement aux discours un peu trop abrupts d'une jeune femme bien sous tous rapports mais de droite, ciel, la forme et le fond, le vulgaire et le populaire, les intellectuels et les élites, le penseur et l'acteur, toutes ces sortes de choses qui se penchent sur nous et que nous croyons connaître, alors qu'il n'en a pas encore commencé le début de l'exploration et qu'il ne sait même pas quel piste est celle qui mène au début de la question, qu'il continuerait son récit du voyage en Amérique de celui qui l'a fait moine,
et il ne s'agit là que de ses promesses dites, je ne vais pas t'étourdir avec ce qui lui monte à la tête quand il lit ici et là, et quand il voit que chacun a déjà posé son petit caillou et sa grosse pierre et qu'il a l'air malin avec son grain de sable, son grain de sel, son grain de fou.

Il n'aime pas que la Folie ait disparu, et que les belles jeunes filles soient battues. Même si elles n'étaient pas belles, d'ailleurs, mais on en est loin chez ces louves et ces étoiles, chez la lionne. Il n'aime pas qu'un chevet de coma s'attarde trop dans le bruit des machines à survivre et le laisse sans nouvelle. Il n'aime pas que ceux qu'il aime à tord et à travers faute de mieux soient tristes, inquiets, fatigués, et que les jeux de l'esprit allègre se perdent dans des marécages grandissants, il n'aime pas que les ordures continuent leurs ordures dans le silence des agneaux, il n'aime pas et après ?

Personne ne l'oblige à ne pas aimer cela, personne ne l'oblige à aimer à tord et à travers, personne ne l'oblige à venir au théâtre du monde, il n'a qu'à rester sur sa chaise à touiller sa cuillère ; moi je pourrai cesser d'aller voir le soir les nuits de pleine lune si des flacons à fiches se sont échouées sur la plage.

Enfin seul.

Sauf que.
je sais bien que je vais continuer à les chercher, ces flacons, et je te jure que je saurai bien en trouver

Commentaires
M
Une inlassable attente, patiente et inlassable parce que résolument optimiste latente ... ce n'est pas drôle ? je n'en disconviens pas
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