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LES ANACHRONIQUES
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28 mars 2018

202 - Vingt-et-unième jour . Du nom et des noms


2/18.    Nommer son enfant.

Pour ne pas s’engager sur une fausse piste, il faut éviter de confondre le nom qui s’échange dans un couple, et le nom que le couple donne à l’enfant.

Bien entendu, les deux situations sont liées et les usages sont encore bien figés qui donnent un nom unique à tout le petit monde de la famille, père mère enfants. Ces usages sont grignotés par les comportements n’en déplaise aux idolâtres d’un passé révolu, auxquels on ne manquera pas de m’associer pour éviter de réfléchir. Il faut bien distinguer le nom que chacun doit porter dans un couple lorsqu’un couple s’est formé, et le nom que ce couple va donner aux enfants si ce couple a des enfants, dépassant alors sa propre durée de vie.

La question de l’échange de nom à l’intérieur du couple est ici une question secondaire. Je vais néanmoins l’examiner brièvement, pour ne plus y revenir ensuite, afin de déminer mon territoire. On me reprochera peut-être la longueur du démarrage, mais pas l’esquive.

Selon le bon vieil usage idolâtre, la femme du jour de son mariage portait le nom de son mari. Tout au plus acceptait-on qu’elle accolât son patronyme, consolation de pacotille. J’ai souvenance d’un temps où non seulement le nom mais le prénom lui-même de madame disparaissait derrière le nom et le prénom de monsieur, où Mademoiselle Bonemine Dumou, sous prétexte de mariage avec un certain Augustin Trucmuche, devenait Madame Augustin Trucmuche. Disparue Bonemine Dumou, volatilisée, interdite à jamais. Je n’ai pas besoin ici de perdre mon temps à dénoncer tout ce que cette pratique encore vivace aujourd’hui implique de domination, notre époque s’efforce heureusement d’oublier cet usage qui pourtant résiste.

Autant le dire tout de suite, cette façon de faire disparaître la femme derrière l’homme, y compris toute la lignée d’où elle respire, m’insupporte. Certains esprits chagrins qui verront dans mes prochains discours une tentative de restauration de cet ordre ancien appelé patriarcal doivent savoir que je réprouve ces usages et qu’il n’y a aucune contradiction entre cela et ce qui vient ; qu’ils me lisent attentivement.

Une mienne et longue tradition familiale, inhabituelle dans le concert des usages de ces époques qui remontent au moins à mes arrières grands-parents, a voulu que dans tous les couples de mes lignées jusqu’à mes parents, chacun a porté son nom de naissance, et ce quelle que soient leurs penchants philosophiques ou religieux, du catho à l’athée, du coco au facho. Il y a tout ce monde-là dans mes globules. Dans mon biberon se trouvaient ainsi tous les ingrédients du conflit permanent que cette tradition entretenait dans ma famille avec les administrations, les voisins, les amis de fraîche date et les ennemis héréditaires : les gendarmes, les maires, les hygiaphones, les douaniers, et tout ce qui, casquette sur le crâne, se considère tenant et aboutissant de l’ordre de l’état-civil ; ils n’ont jamais réussi à faire plier le clan. Bonemine s’est toujours nommée Bonemine de mère en fille, et Augustin Augustin de père en fils. Dumou pour l’une et Trucmuche pour l’autre. Il n’y a pas de mais. Quant aux courriers reçus à la maison par madame (grand-mère, mère, femme, fille), s’il portait derrière la madame le nom du mari c’était péché véniel, s’il portait le prénom du mari c’était péché mortel, et si la lettre venait d’un ami il ne l’était plus. C’est dire comme pour moi cette cause-là vaut chute petit dans la marmite.

Ce sujet est désormais évacué. Non ; encore un petit point. Pour faciliter la comprenette des ignorants et pousser mon bouchon jusqu’en butée, il me faut préciser que, dans nos usages familiaux, le mari pouvait tout aussi bien s’affubler du nom de sa femme sans que cela ne dérange personne par chez nous, pour peu que la situation s’y prêtât.

Ainsi Monsieur et Madame font ce qu’ils veulent de leurs noms depuis toujours chez moi, depuis peu chez les autres. J’en ai fini de ce sujet ici. La seule question posée désormais est celle du nom qu’on donne à l’enfant qui naît. Cette question-là me chagrine, cette question-là seule est décisive. La pilule est autrement difficile à avaler.

Que ce soit bien clair : je m’élève avec toute l’énergie de vieux moine dont je suis capable contre cette pratique légalement instituée qui consiste à laisser le choix aux parents du nom que porteront leurs enfants. J'ai bien écrit "le nom", il ne s'agira pas ici du prénom, du surnom, du petit nom, et des sobriquets et autres étiquettes. C’est la raison pour laquelle je suis monté sur mon tabouret glacial et que j’harangue la population absente pour cause de blizzard. J’espère avoir assez de temps pour tout dire avant d’être entraîné chez les fous

Je vais m’expliquer en déroulant tous les tentacules du sujet, espérant sans y croire que je ne serai pas récupéré par la triste engeance des traditionalistes de tout poil. C’est évidemment le danger qui me guette de tous côtés, les uns m’accusant de vouloir reconstruire l’ordre ancien, les autres se réjouissant de me voir défendre le passé. Double contre-sens auquel je ne pourrai rien et qui ne m’empêchera pas de poursuivre mes marottes.

3/18 à suivre

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