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LES ANACHRONIQUES
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24 septembre 2018

213 - Trente-et-unième jour . Le long chemin

12/18.    Formalisme et paperasse

Je dois avouer mon ignorance en procédures d’état civil ; mais je ne les juge pas sans importance et je veux en avoir fini avec tous les aspects de la question du nom.

Des anomalies existent aujourd’hui, à cause de pratiques imprécises, d’officiers incompétents ou intrusifs et de rigidités administratives, j’en conviens volontiers et je souscris à la nécessaire neutralité du scribe. Mais ne venez pas m’agacer là-dessus, ce n’est pas mon sujet, avec ce froid sur la place je pourrais me taire à jamais si je me dispersais.

Voici ce qui me préoccupe : quelle que soit la forme de la démarche administrative et le lieu où elle s’accomplit, sur terre sur mer en l’air, il est indispensable que l’homme qui n’est pas encore le père au moment du cri surtout si tout blanc il vacille sur sa chaise, se mette en état de le devenir, sans retour possible. Là est le point essentiel : l’impossible renoncement. Il est indispensable que tous sachent et témoignent de ce qu’ils ont vu, et pour y parvenir il faut un rituel, de préférence le jour même mais il arrive que ce soit longtemps après, il arrive tant de choses.

Deux volontés et deux décisions doivent alors se confondre. La volonté et la décision de la dame qui désigne le monsieur, sans cet aveu rien n’est possible et cet aveu engage par-dessus toute autre manipulation de laboratoire. Et face à elles, la volonté et la décision de l’homme d’accepter la désignation, sans cette acceptation, cette soumission, rien ne sera possible non plus. C’est la volonté et la décision de la femme de faire cet aveu, c’est la volonté et la décision de l’homme de recevoir cet aveu, et alors ils deviennent irrémédiablement père et mère, sinon tout-à-fait du moins en devenir, mais en tout cas irrémédiablement.

L’administration veille et le scribe grave l’aveu et la soumission sur les tablettes de la cité. On pourra tartiner des pages sur les modalités du scribe, pourvu qu’elles soient fiables.

Il n’y a pas symétrie entre la femme et l’homme dans ce moment décisif, l’ultime moment où tout peut encore basculer. La femme a désigné, aveu, l’homme a accepté, soumission, le scribe a gravé la tablette, naissance. Dès cet instant, l’homme sera le père de l’enfant pour le restant de leurs jours à tous deux, à charge pour eux d’apprendre le métier de père et d’enfant, ils ont toute la vie pour le faire avec toutes les obligations qui en découlent. Certitude absolue et unique, moment unique et absolu, la prise en charge d’un être humain. Je n’ai pas dit l’appropriation, attention aux mots que vous lisez. Et qu’il faille toutes les années à suivre pour que la paternité s’accomplisse n’y change rien.

Et souvent, surgit à cet instant une bouffée de bonheur total : le long chemin vient juste de commencer.

La transmission du nom est le résultat de cette dissymétrie et le signe de l’obligation vitale, j’allais dire viagère, qui désormais lie le père à l’enfant, le père vers l’enfant, le symbole, la preuve. C’est l’échange fondamental, qui signe et qui désigne un engagement dont personne naturellement ne mesure le poids au moment où il se prend. Quand même le monsieur tenterait de fuir à l’autre bout du monde sous prétexte d’acheter des cigarettes, courir tous les jupons qui passent à sa portée, renier les promesses de l’aube lumineuse ou du tendre crépuscule, son enfant portera son nom et il ne pourra jamais feindre de l’ignorer.

Ce ne sera jamais un privilège, un droit, une récompense. Juste une obligation définitive.

Que devient la mère dans ce tourbillon ? Il est question ici du nom du père et de ses obligations, justement pour que s’équilibrent enfin les fardeaux respectifs. Le père qui se dérobe se verra privé de nom à transmettre, mais nous n’en sommes pas encore là.

#13/18 à suivre

 

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