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LES ANACHRONIQUES
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25 octobre 2022

362 - Octante-deuxième jour . Le combat perpétuel

Des mois que j’attends le retour du Moine, parti je ne sais où ; touriste à son tour ? Je m’assoie et j’attends qu’il repasse. Il reviendra bien, près de son icône.

Le Nil est un autre fleuve que je n’avais jamais vu, une après-midi à le contempler comme si de rien n’était, et rien n’est. Ce n’est plus le fleuve que j’avais contemplé qui s’étire en luisant sous les étoiles, le monde renaît encore, je parie que demain le soleil va se lever, un soleil tout neuf. Je m’extrais de la petite table, du fauteuil fatigué qui attendra, blasé, d’autres poids, d’autres postérieurs augustes ou insignifiants, tous aussi postérieurs les uns que les autres et le fauteuil m’a déjà oublié.

Le combat de l’ombre et de la lumière, et tout ce qui pourra me contrarier, je dois m’y habituer. Le chaud si l’on aime le froid, le froid le chaud, l’humide le sec, le haut le bas, la gauche la droite, la richesse la pauvreté. A chaque couple son champ de bataille, et un long développement pour le parcourir. Je n’ai pas du tout l’intention de les parcourir, ces champs de bataille, puisqu’il faut seulement écrire ici que ces couples sont insolubles, en ce sens qu’aucun ne peut se trouver un jour rompu, dilué, dans quelque bain consensuel que ce soit.

Les contre-sens sont à l’affût : Aristote n’est jamais loin qui tente de ramener la couverture à lui. Je ne fais pas ici le lit du riche en le disant légitime face au pauvre. Entre eux, entre leurs mondes la guerre est incessante. Il ne faudra jamais se résigner à la pauvreté, tout en sachant qu’elle sera toujours là, avec ses haillons. La richesse l’emporte le plus souvent ; et lorsque, rarement, la pauvreté l’emporte mais ce serait plus juste d’écrire les pauvres plutôt que la pauvreté, on appelle cela une révolution, mais bientôt reviennent les différences car on le comprend bien ici, il ne faut pas confondre les pauvres et la pauvreté, les riches et la richesse. Déplorer ou se réjouir que la révolution survienne est une autre affaire que cette affaire de contrariété. Ne t’en déplaise, mon bon Aristote, rien n’existe si son contraire n’existe pas, ainsi vont les sociétés des hommes, le monde hors les hommes, le monde hors la terre,  et pourquoi pas le monde hors l’univers. L’antimatière et la matière, là où les trous noirs sont devenus blancs.

Rien ne tient en place, de la galaxie lointaine au caillou là à mes pieds. Richesse et pauvreté, semblables à ces cohortes interminables, crédules et incrédules, poissons et viandes, masculin et féminin, fous et raisonnables, vous avez remarqué que je suis dans le camp du fou mais en êtes-vous vraiment certains, Charybde et Scylla, orient ou occident, métro ou auto, valise ou cercueil, jazz ou java…. A chaque couple une thèse ne suffirait pas à résoudre le conflit, l’invraisemblance, l’insupportable, et pourtant chaque couple est autrement plus uni que les plus célèbres amants de l’histoire de l’amour. Ainsi tourne le cosmos sur lui-même.

Il faut choisir son camp. Il faut refuser les compromis. Le contraire doit combattre son contraire avec acharnement. Mais sous peine de mort aucun ne devra jamais l’emporter, du moins pas toujours ni tout à fait. Ce serait si beau si le vainqueur était le Bien avec une bouche bée majuscule, et le vaincu le mal où l’aime est minuscule. Gagner définitivement ferait qu’à l’instant précis de notre victoire définitive à nous qui serions le Bien nous ne le serions plus, nous ne serions plus.

Il fait nuit sur la terrasse, on ferme.

FIN du Chapitre 17   -   Mars 2004/Octobre 2022

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